Après le deuxième tour des élections régionales
Bien
qu’en situation de l’emporter dans au moins trois régions, le Front
national n’est parvenu à en conquérir aucune. Comme le montre la
participation en hausse, il y a eu, dans toutes les régions, un réflexe
de rejet du Front national.
Dans l’éventail des partis bourgeois, le FN est le plus
réactionnaire qui soit. Il distille le poison de la division dans le
monde ouvrier et une fraction importante de l’électorat en est
consciente.
Parmi ceux qui craignaient que le FN prenne une région, c’est donc un
soulagement, mais un soulagement qui risque d’être de courte durée.
Il faudrait être naïf pour croire que la victoire d’Estrosi en Paca
ou celle de Bertrand dans le Nord protège les habitants de ces régions
des idées crasses du FN. Si le Front national ne l’a pas emporté au
second tour, il atteint dans toutes ces régions des scores très élevés.
La montée du FN pèsera sur la vie politique et sociale. D’autant plus
que la droite comme le PS en amplifieront la pression, engagés qu’ils
sont dans la compétition pour regagner l’électorat du FN, en reprenant
son discours sécuritaire et réactionnaire.
Le PS se félicite d’avoir fait barrage au FN en retirant ses listes
dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie et en Provence-Alpes-Côte d'Azur et
en appelant à voter pour la droite, y compris dans le Grand Est où le
notable socialiste avait, contre les consignes du PS, refusé de se faire
harakiri. Et, tout cela, au nom de la défense des valeurs de la
République.
Elle est belle, leur République, qui ne laisse à l'électorat que le
choix entre la droite et l'extrême droite, c'est-à-dire entre pire et
pire encore ! Elle est belle, leur démocratie où le summum du courage
politique est d’abdiquer et de renier ses idées !
Même la direction du PC s’est couchée devant les hommes de droite.
Pendant des années, elle a expliqué qu’il fallait à tout prix « battre
la droite ». En 2012, pour battre Sarkozy, elle a appelé à voter
Hollande au second tour de la présidentielle. Et voilà qu'elle vient de
contribuer à faire élire un Estrosi et un Bertrand, deux hommes de
droite parmi les plus détestables !
Et faut-il rappeler que la gauche gouvernementale avait déjà appelé à
voter Chirac en 2002 en brandissant la nécessité de faire barrage à Le
Pen, qui n'avait pourtant, à l'époque, aucune chance d'être élu ?
De trahison en abdication, la gauche a fini par déboussoler et
écœurer son propre électorat. Une majorité de cet électorat populaire a
pris l'habitude de se réfugier dans l'abstention. Mais une minorité
croissante a remplacé ses illusions dans les partis de gauche par celle,
plus grave, du FN.
Le Front National se pose en alternative alors qu'il n'a rien d'autre
à vendre, comme programme politique, que son chauvinisme, sa haine de
l'étranger et ses préjugés crasses. Pour le reste, il aspire, comme les
autres, à gouverner pour le compte du grand patronat et des banquiers.
Car malgré ses slogans démagogiques en direction des travailleurs, il
est d’abord et avant tout un défenseur de l’ordre bourgeois.
Un des pires poisons que la gauche gouvernementale a distillés depuis
des décennies parmi le monde du travail, c'est l'espoir qu'ils peuvent
changer leur vie en votant bien. Là est la tromperie fondamentale. Le
sort des travailleurs ne dépend pas des pantins que les exploités ont le
droit d’élire et qui s'agitent sur le devant de la scène politique. Il
dépend du pouvoir de la grande bourgeoisie, de ceux qui détiennent le
capital et dominent la vie économique.
Les partis qui ne combattent pas cet ordre social, le pouvoir du
grand patronat et de la finance, ne peuvent que trahir les promesses
qu'ils font aux classes populaires. C'est ainsi de tout temps, et plus
encore en cette période de crise de l'économie capitaliste où cette
minorité ne peut prospérer qu'en poussant encore plus les exploités dans
la pauvreté.
Alors, il n'y a ni à se réjouir ni à s’attrister de ce énième épisode
électoral. La force des travailleurs n'est pas dans les urnes, mais sur
le terrain, dans les entreprises qu’ils font fonctionner, dans les
quartiers populaires. Leur sort ne dépend pas de résultats électoraux,
mais de leur capacité à se battre collectivement avec leurs armes de
classe, les grèves et les manifestations.
Individu par individu et, même, entreprise par entreprise, les
travailleurs ne font pas le poids face à la puissance du grand capital.
Tous ensemble, ils représentent une force invincible. Mais ils ne
peuvent se battre efficacement que s'ils rejettent toute illusion dans
les politiciens de la bourgeoisie et s’ils savent clairement qui sont
leurs ennemis, même lorsqu'ils se déguisent en faux amis. C'est de cette
prise de conscience des travailleurs que dépend leur capacité à se
défendre contre les attaques de la grande bourgeoisie et à mettre fin au
règne du capital.
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